Thèmes anglais – Préface et avant-propos
« COURS COMPLET D’ANGLAIS
SUIVANT LES LEÇONS DE L’UNIVERSITÉ
EN TROIS VOLUMES »
Un cours complet d’Anglais, tel que peut l’offrir la libraire, ne commence, à proprement parler, qu’une fois les premiers éléments de la conversation fournis de vive voix par un excellent maître. Encore celui-ci doit-il, pour mettre comme un résumé de ses leçons entre les mains de l’élève, se servir d’un manuel de dialogues parfait et consacré par l’usage, comme l’est celui de Sadler, que nous ne cessons de réimprimer. Puis vient bientôt l’heure où, un dictionnaire très sérieux (citons également l’ouvrage de l’éminent Sadler) place sur sa table de travail, il faut que l’étudiant s’essaie à traduire soit de l’Anglais en Français soit du Français en Anglais. Le désir le plus violent d’innover ne permettra jamais à qui prend la plume pour travailler seul, un instant, de faire autre chose que des Versions ou des Thèmes; peut-être vaut-il mieux dire des Thèmes d’abord puis des Versions.
Ici commence l’intervention du Cours complet d’Anglais suivant les leçons de l’Université, que nous présentons au public polyglotte.
Rien dans nos Versions qui ne soit puisé aux plus pures sources de la langue puisque ce sont les morceaux classiques de l’Anglais que nous mettons sous les yeux, prose et vers, en un volume. Un échantillon propre, en sa brièveté, à donner comme un avant-goût de toutes les beautés qu’on trouvera un jour à la lecture des auteurs anglais depuis les plus vieux maîtres jusqu’aux écrivains encore vivants, voilà ce qu’offre chacune de ces attrayantes versions.
Complément indispensable de cet enseignement du style il reste à étudier un manuel où soit exposé le génie familier même du langage. Jamais cours de Thèmes a-t-il pu prétendre à ce rôle ? Non: les meilleurs ne contenant que des sentences du cru de ceux qui les produisirent. C’est dans la langue même, pour que le cours de Thèmes fût digne du cours de Versions faits avec les chefs-d’oeuvre de la Littérature, qu’il s’agissait de puiser un nouveau trésor. Dictons, proverbes, locutions spirituelles et imagées, toute la richesse intime de l’Anglais a été mise à contribution ici, et voici que retraduits de leur calque français dans leur forme originelle anglaise par l’élève, ils restent en sa mémoire, appris en leçons après avoir servi de thèmes.
On voit combien un seul et même esprit, littéraire autant que pratique, préside à l’usage qu’il sied de faire du recueil de thèmes et du recueil de versions. Rarement enseignement présenté sous sa double face a montré une aussi profonde unité.
Plus rien d’oiseux ou simplement de gratuit. C’est ainsi la fleur même de l’Anglais, humble et quotidienne dans ses phrases de chaque jour, superbe et rare dans les extraits de ses grands auteurs, qui s’offre à faire l’éducation de l’enfant ou d’une grande personne, presque au seuil de son étude.
Ces Thèmes pour toutes les grammaires qui sont, autant qu’il était permis à des thèmes de le devenir l’envers ou la face française des pages célèbres de l’Anglais contiennent, comme elles, des notices critiques et biographiques, eux, de simples règles de grammaire. Toute la grammaire répartie en une centaine de règles, équivalant au travail d’une année.
Si bien que tous deux, employés ensemble ou l’un après l’autre, celui-là précédant celui-ci, au gré de l’élève ou sur le conseil du professeur, proverbes et morceaux choisis forment tout un Cours d’Anglais. S’ils ne sauraient être pris séparément, ils peuvent conjointement s’isoler de tout autre livre d’enseignement. Ils vont de l’étude des règles à la connaissance du style, basées sur ce que possède de mieux la langue anglaise.
Toutefois nous avons pensé que, thèmes et versions, ces deux modes traditionnels de tout bon enseignement ne suffisaient peut-être point aujourd’hui, qu’une grande curiosité relative à la signification et à l’origine de ce qu’on apprend se fait jour dans tous les esprits.
Ce que c’est que l’Anglais est le titre d’un petit ouvrage résumant en quelques exemples succincts l’ordonnance même de toute la langue anglaise; bref expliquant le dictionnaire, le coupant pour ainsi dire en tranches plus faciles à apprendre. L’enfant peut commencer par là son étude de l’Anglais comme le jeune homme la finira par les Mots anglais, vaste travail philologique qui fait pour l’Anglais ce que de récentes publications d’érudits ont fait pour les langues antiques apprises dans nos lycées. Un critique important d’un grand journal appréciait récemment par ces mots cet ouvrage dont la publication a précédé d’un an ou de deux les remaniements du programme scolaire qui doivent en prescrire l’étude. » Un très curieux et très utile essai de philologie sur LES MOTS ANGLAIS, par M. Stéphane Mallarmé, le savant et ingénieux professeur du lycée Fontanes; ce livre, d’une méthode très neuve et très nette rendra de grands services à tous ceux qui s’intéressent à la langue et à la littérature anglaises. »
Pas un livre de plus que ces trois (qu’on prenne l’abrégé ou la philologie elle-même) existant à des titres très différents, si l’on veut; mais se complétant intimement. Qui lira l’un attentivement et traduira les deux autres tels que les lui présente la collaboration de l’esprit littéraire des grands écrivains et de l’instinct plein de bonhomie et de charme du peuple anglais, auteur des mille proverbes, saura non seulement à fond la lettre de l’Anglais, mais en connaîtra l’âme et l’esprit.
Faire le plus avec le moins d’instruments possible, c’est le résultat que doit faire atteindre à l’élève un Cours Complet d’Anglais en trois volumes.
Stéphane Mallarmé
AVANT-PROPOS
Le manque d’un Cours de Thèmes, propre à devenir classique se fait aujourd’hui sentir, dans l’étude de l’Anglais.
Quel ouvrage cependant nécessaire! On fera toujours des Thèmes; toujours on cherchera le Recueil qui, la Grammaire apprise, la remémore et pour ainsi dire l’illustre le mieux.
La cause de la désuétude qui frappe des Cours de Thèmes jusqu’à maintenant suivis, c’est d’abord–n’hésitons point à la dire–que ces recueils n’ont présenté longtemps que des phrases oiseuses et manquant d’attrait. Un Maître se demande avec raison « Ne trouverai-je pas mieux en moi-même et sans livre? » puis il reconnaît bientôt que l’improvisation est faite pour donner des résultats brillants, mais un peu gratuits, ou n’ayant point ce caractère durable qui doit marquer toute matière confiée à la mémoire de l’enfant.
Il n’y a pas lieu à innovations dans un exercice aussi traditionnel que le Thème, et tout est là simplement: trouver des phrases qui, sous leur aspect français, sachent tout d’abord éveiller l’intérêt, puis rendues à l’Anglais originel, possèdent comme un droit à se fixer dans l’esprit. Ce droit, pour l’avoir, il faut que les exemples d’un bon Cours de Thèmes, une fois traduits et corrigés, se trouvent appartenir, à quelques titres, au fonds même de la langue anglaise.
Rien d’impossible en ce programme, pour peu que l’on songe à un fait.
C’est que, comme toute langue, l’Anglais est riche d’un trésor de phrases ancien et toujours neuf, précieux, charmant, le dépositaire du génie national tout en étant la monnaie courante de la conversation. Je parle des proverbes, des dictons, des locutions familières. Ces sentences offrent-elles une application suffisante à la Grammaire ? Toujours. Jaillie de l’instinct de la race et polie au cours des siècles, chacune se trouve presque exclusivement frappée à l’empreinte évidente d’une Règle, avec la netteté qu’on doit attendre. Le fait, sans cesse vérifié, cause sans cesse, par son exactitude à se reproduire, une surprise nouvelle.
Mais sur la trace de ce filon, recueillir pendant des années tout ce que possédait l’Anglais en phrases typiques, locutions usuelles, etc., devint mon occupation; moins difficile peut-être que de réduire ma récolte à un petit nombre de modèles parfaits. J’écartai d’abord les quelques traits un peu rudes ou grossiers qui pouvaient offusquer la jeunesse, ou les préceptes entachés d’un certain égoïsme britannique.
Puis, dans cette vaste opération du triage, je m’en rapportai, chargé depuis longtemps d’un Cours d’Anglais au lycée Fontanes, presque uniquement à l’expérience quotidienne du professeur. Le goût des enfants m’a souvent décidé, s’attachant à merveille au tour le plus piquant ou à l’expression la plus imagée, non moins qu’à toute pensée haute; ou même saisissant entre plusieurs exemples la manifestation la plus nette d’une règle grammaticale.
Le plan primitif avait été fort simple, et suggéré aussi par la pratique. Grouper une dizaine de phrases autour de chaque Règle, ce qui suffit pour un seul devoir, et répartir l’étude de la grammaire en autant de points capitaux qu’il y a de classes, de cent à cent cinq, dans l’année scolaire;
La distribution de ces mille exemples d’élite correspond ainsi à celle du travail. J’ajoute, que les leçons d’une heure aujourd’hui établies dans les lycées, collèges, etc., ne permettent pas au professeur de prélever, sur le temps de son enseignement, la dictée d’un thème, mais imposent l’usage du livre placé entre les mains des élèves.
L’enfant eût-il la plus claire des grammaires et le plus complet des dictionnaires, il est bon encore qu’un Cours de Thèmes lui rappelle la règle avant chaque exercice, l’aide de notes relatives à la traduction des mots, bref mette tous les matériaux du travail sous les yeux.
Le livre ouvert présente sur sa double page tout ce que peut exiger la confection du devoir.
Divisé en deux parties comme tout ouvrage du même genre, celles du Maître et de l’Élève ou l’Exercice et le Corrigé (que doivent l’une et l’autre, se procurer les personnes qui étudient seules) ce Cours de Thèmes offre l’avantage rare de pouvoir s’adapter à toutes les Grammaires dont il suit la marche ordinaire et accepte le concours de tout dictionnaire. Mais il met également l’élève à même de se passer d’aucun autre livre; et existe d’abord par soi seul.
Me faut-il bien augurer des heureux effets obtenus par le manuscrit dans les diverses classes confiées à mes soins ? Je demande, avant tout, à mes collègues d’aider, par leur précieuse sympathie, ce volume, fruit d’un travail long et spécial, à prendre une place, maintenant vacante, dans l’enseignement de l’Anglais.
Stéphane Mallarmé
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