Biographie


Étienne Mallarmé, qui se fait appeler Stéphane dès sa naissance, naît le 18 mars 1842 dans l'ancien 2e arrondissement de Paris. Issu d'une famille bourgeoise de juristes originaire de Lorraine, il a des ascendances nobles du côté de son père, Numa Mallarmé. À la naissance de la sœur de Stéphane, Maria, le 25 mars 1844, Numa Mallarmé achète la propriété des Boulainvilliers à Passy (aujourd'hui dans le 16e arrondissement), grande demeure entourée d'un jardin. Stéphane y passe les premières années de sa vie, chéri par sa mère, Élisabeth Desmolins, et ses grands-parents maternels. Mais la santé de sa mère décline, et elle meurt le 2 août 1847 ; Stéphane et Maria sont confiés à leurs grands-parents, tandis que leur père se remarie l'année suivante. Stéphane retourne vivre aux Boulainvilliers, où il côtoie des artistes comme Charles-Hippolyte Dubois-Davesnes, dont la fille Fanny lui apprend à écrire ses premiers poèmes. Sur les conseils d'une grand-tante, il entre en 1850 dans une pension aristocratique à Auteuil, où il est moqué par ses camarades pour ses origines roturières et s'invente le titre de comte de Boulainvilliers. Il est admis dans un pensionnat chrétien (les Frères de Passy aux 64-68 rue Raynouard) en 1852, où il se révèle un élève médiocre et taciturne, et se fait renvoyer en 1855. En 1856, il devient pensionnaire au lycée impérial de Sens. Alors qu'il est très proche de sa sœur Maria, à qui il envoie de nombreuses lettres et qu'il a plaisir à retrouver chez ses grands-parents l'été, elle meurt soudainement le 31 août 1857, âgée de treize ans. Stéphane est fortement marqué par ce décès.

Il compose ses premiers poèmes d'adolescence (qui sont recueillis dans Entre quatre murs), textes encore fortement inspirés par Victor Hugo, Théodore de Banville ou encore Théophile Gautier. La découverte des Fleurs du mal de Charles Baudelaire en 1860 est marquante et influence ses premières œuvres. Cette même année, Mallarmé entre dans la vie active en devenant surnuméraire à Sens, « premier pas dans l'abrutissement » selon lui. En 1862, quelques poèmes paraissent dans différentes revues. Il fait la connaissance d'une jeune gouvernante allemande à Sens, Maria Gerhard, née en 1835, et quitte son emploi pour s'installer à Londres avec elle, ayant l'intention de devenir professeur d'anglais. Son séjour dure de novembre 1862 à la fin de l'été 1863.

Réformé du service militaire en 1863, Stéphane Mallarmé se marie à l'Oratoire de Londres avec Maria le 10 août. Il obtient en septembre son certificat d'aptitude à enseigner l'anglais — il est notamment le professeur d'Henri Barbusse — et est nommé au lycée impérial de Tournon (Ardèche), où il se considère comme exilé. Il ne cesse durant cette période de composer ses poèmes, comme Les fleurs, Angoisse, Las d'un amer repos… Durant l'été 1864, Mallarmé fait la connaissance à Avignon des félibres, poètes de langue provençale : Théodore Aubanel, Joseph Roumanille et Frédéric Mistral, avec qui il entretient une correspondance. Sa fille Geneviève naît à Tournon le 19 novembre 1864. Il est parallèlement professeur d'anglais dans cette ville ainsi qu'à Besançon, Toulon et Paris durant la même période.

L'année suivante, il compose L'Après-midi d'un faune, qu'il espère voir représenter au Théâtre-Français, mais qui est refusé. Il se lie avec le milieu littéraire parisien, notamment avec Leconte de Lisle et José-Maria de Heredia.

L'année 1866 marque un tournant pour Mallarmé : lors d'un séjour à Cannes chez son ami Eugène Lefébure, il entre dans une période de doute absolu qui dure plusieurs années. Nommé professeur à Besançon, il entame en novembre une correspondance avec Paul Verlaine. En 1867, alors qu’il est en poste à Avignon, démarre la publication de ses poèmes en prose et il va plusieurs fois rendre visite à Frédéric Mistral à Maillane. Il commence en 1869 l'écriture d’Igitur, un conte poétique et philosophique laissé inachevé, qui marque la fin de sa période d'impuissance poétique débutée en 1866. Certains critiques ont vu dans Igitur une préfiguration, voire une première version du Coup de dés. En 1870, il se met en congé de l'instruction publique pour raisons de santé et se réjouit de l'instauration de la République en septembre. Son fils Anatole naît le 16 juillet 1871 à Sens et, Mallarmé ayant été nommé à Paris au lycée Condorcet, la famille s'installe au 29, rue de Moscou.

En 1872, Mallarmé fait la connaissance du « passant considérable » alors jeune poète, Arthur Rimbaud, qu’il fréquente brièvement, puis, en 1873, du peintre Édouard Manet, qu'il défend lorsque ses tableaux sont refusés au Salon de 1874. C’est par Manet qu’il rencontre ensuite Zola. Mallarmé fait publier une revue, la Dernière Mode, qui sort huit numéros et dont il est l'unique rédacteur sous divers pseudonymes, la plupart féminins. Nouveau refus des éditeurs en juillet 1875 de sa nouvelle version de L'Après-midi d'un faune, qui paraît néanmoins l'année suivante, illustrée par Édouard Manet, chez Alphonse Derenne. Il préface la réédition du Vathek de William Beckford. Dès 1877, des réunions hebdomadaires, devenues vite célèbres, se tiennent le mardi chez Mallarmé. Il fait la rencontre de Victor Hugo en 1878 et publie en 1879 un ouvrage sur la mythologie, Les Dieux antiques. Son fils Anatole meurt brutalement le 8 octobre 1879.

À partir de 1874, Mallarmé, de santé fragile, effectue de fréquents séjours à Valvins près de Fontainebleau. Il loue pour lui et ses proches le premier étage d'une ancienne auberge au bord de la Seine. Il finit par l'acquérir et l'embellit de ses mains pour en faire son home. Là, les journées s'écoulent entre deux parties de pêche avec Nadar ou d'autres illustres hôtes, face à la forêt miroitant dans la Seine, et le poète alors de dire : « J'honore la rivière qui laisse s'engouffrer dans son eau des journées entières sans qu'on ait l'impression de les avoir perdues. »

En 1884, Paul Verlaine fait paraître le troisième article des Poètes maudits consacré à Mallarmé ; cette même année, Joris-Karl Huysmans publie À rebours, dont le personnage principal, Jean des Esseintes, voue une vive admiration aux poèmes de Mallarmé — d'où le poème intitulé Prose pour des Esseintes. Ces deux ouvrages contribuent à la notoriété du poète. Stéphane Mallarmé est nommé professeur d'anglais au lycée Rollin en 1885 où il enseignera jusqu'en 1893. La même année, il évoque l'explication orphique de la Terre. Son premier poème sans ponctuation paraît en 1886, M'introduire dans ton histoire. La version définitive de L'Après-midi d'un faune est publiée en 1887. Un an plus tard paraît sa traduction des poèmes d'Edgar Allan Poe.

En 1891, sa santé se détériore à nouveau. Mallarmé obtient un congé puis une réduction d’horaire. Il fait la connaissance d’Oscar Wilde et de Paul Valéry au pont de Valvins (ce dernier faillit s'y noyer). Paul Valéry est un invité fréquent des Mardis mallarméens. En 1892, à la mort d'Eugène Manet, frère d'Édouard Manet, Mallarmé devient le tuteur de sa fille, Julie Manet, dont la mère est la peintre Berthe Morisot. C'est à cette époque que Claude Debussy débute la composition de sa pièce Prélude à l'après-midi d'un faune, présentée en 1894. Mallarmé obtient sa mise à la retraite en novembre 1893. L'année suivante, en 1894, il donne des conférences littéraires à Cambridge et Oxford. Deux années passent, le poète assiste aux obsèques de Paul Verlaine, décédé le 8 janvier 1896, et lui succède comme prince des poètes.

En 1898, il se range aux côtés d'Émile Zola qui publie dans le journal L'Aurore, le 13 janvier, son article « J'Accuse », en faveur du capitaine Alfred Dreyfus (voir l’Affaire Dreyfus). Le 8 septembre 1898, Mallarmé est victime d'un spasme du larynx qui manque de l'étouffer. Le soir même, il recommande dans une lettre à son épouse et à sa fille de détruire ses papiers et ses notes, déclarant : « Il n'y a pas là d'héritage littéraire… » Le lendemain matin, victime du même malaise, il meurt dans les bras de son médecin, en présence de son épouse et de sa fille. Il est enterré auprès de son fils Anatole au cimetière de Samoreau, près de Valvins. Maria Mallarmé meurt en 1910.

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