A M.L.S.
A M.L.S.
Edgar Allan POE
Traduction de Mallarmé Il n'y a pas longtemps, l'auteur de ces lignes, dans dans un fol orgueil d'intellectualité, maintenait " la puissance des mots " - niait que jamais pensée surgît dans le cerveau humain, supérieure à son énonciation par la langue humaine. Et, maintenant comme par une moquerie de cette jactance, deux mots - deux doux dissyllabes étrangers, musique italienne, faits seulement pour être murmurés par des anges, au clair de lune, rêvant d' " une rosée qui pend comme des liens de perles de la colline d'Hermon " - ont suscité de l'abîme de son coeur des pensées comme il ne s'en place point et qui sont l'âme de la pensée ; de plus riches, de bien plus étranges, de bien plus divines visions que le séraphique harpiste Israfel même (qui a " la plus suave voix de toutes les créatures de Dieu ") ne saurait prétendre énoncer. Et moi ! mes charmes sont rompus : la plume tombe impuissante de ma main qui vacille. Avec ton cher nom pour texte, je ne puis, quoique commandé par toi, écrire - ne puis parler ou penser - hélas ! je ne puis sentir ; car ce n'est point sentir, cette immobile station sur le seuil d'or de la grille grande ouverte des rêves, à considérer, extasié, le fond de la somptueuse allée : et, frémissant de ne voir, à droite, à gauche et le long de la voie, parmi les vapeurs empourprées, tout au loin où la perspective se termine - que Toi. |
Poème original |
SCOLIE Stéphane MALLARMÉ
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